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25 juillet 2007

MAURIAC ET MOI

Thérèse, beaucoup diront que tu n'existes pas. Mais je sais que tu existes, moi qui, depuis des années t'épie et souvent t'arrête au passage, te démasque.
Adolescent, je me souviens d'avoir aperçu, dans une salle étouffante d'assises, livrée aux avocats moins féroces que les dames empanachées ta petite figure blanche et sans lèvres.
Plus tard, dans un salon de campagne, tu m'apparus sous les traits d'une jeune femme hagarde qu'irritaient les soins de ses vieilles Parentes, d'un époux naïf : __ << Mais qu'a-t-elle donc ? disaient-ils. Pourtant nous la comblons de tout. >>
Depuis lors, que de fois ai-je admiré, sur ton front vaste et beau, ta main un peu trop grande ! Que de fois, à travers les barreaux vivants d'une famille, t'ai-je vue tourner en rond, à pas de louve ; et de ton oeil méchant et triste tu me dévisageais.
Beaucoup s'étonneront que j'aie pu imaginer une créature plus odieuse encore que tous mes autres héros. Saurai-je jamais rien dire des êtres ruisselants de vertu et qui ont le coeur sur la main ? Les << coeurs sur la main >> n'ont pas d'histoire... mais le connais celle des coeurs enfouis et tout mêlés à un corps de boue.
J'aurais voulu que la douleur, Thérèse, te livre à Dieu ; et j'ai longtemps désiré que tu fusses digne du nom de sainte Locuste. Mais Plusieurs, qui pourtant croient à la chute et au rachat de nos âmes tourmentées, eussent crié au sacrilège.
Du moins, sur ce trottoir où je t'abandonne, j'ai l'espérance que tu n'es pas seule.

Mauriac, Therese Desqueyroux.

C'est mon prof de lettre qui me donna la clé, mais trop jeune pour voir les turpitudes de ma vie de presque femme, j'oubliais le contenu et analysais le texte avec mes 20 ans d'egoiste.

Aujourdh'ui je sais. Peut etre un peut trop tard..

Alors je relis, je cherche la faille, la mienne.

Therese est ma madeleine de Proust, je la goute et la savoure. Cette femme aux accents d'imperfection se fait mienne. Ce tout ou rien qui rend la vie impossible mais si savoureuse.

J'aurais pu, il y a 2 siecles, empoisonner le rempart au bonheur. Oui mais desormais tout est plus facile, on s'en va et on recommence.

La meurtriere n'est pas celle qui agit par desepoir, c'est celle qui decide et desire une autre vie.

Je deviens alors la meurtriere de mon absolu.

therese

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